Les écoles maternelle et élémentaire ont désormais un nom. Une cérémonie de dénomination s’est déroulée mardi 21 juin 22, en présence des familles concernées, des personnalités, du monde enseignant, et de toutes celles et tous ceux, enfants et parents, ont souhaité s’associer à ce moment important pour la commune. MM. Assié, conseiller régional, et Roques, inspecteur d’académie, étaient présents, autour d’une forte délégation municipale.
Baptiser les écoles a permis mettre en lumière deux personnalités ouveillanaises qui ont marqué leur époque : Jeanne Bleton pour la maternelle, Julien Aussenac pour l’élémentaire.
Deux noms à jamais inscrits dans la mémoire collective.
Jeanne Bleton-Barraud
Elle fait partie des petites histoires qui rejoignent volontiers la grande, avec un grand H. Le destin de Jeanne Bleton s’est écrit sur la devise de la République française, liberté, égalité, fraternité. La liberté, elle l’a défendue au péril de sa vie. L’égalité, elle l’a prônée à travers l’enseignement pour tous. La fraternité, elle l’a exprimée en mettant en pratique la tolérance.
Jeanne naît à Ouveillan en 1924. A l’école, son institutrice, Melle Berlan, décèle ses qualités intellectuelles et humaines et la pousse à poursuivre ses études. Ce que Jeanne accomplit, à Béziers puis au lycée Clémenceau à Montpellier. Normalienne lettrée avec un goût prononcé pour l’écriture, Jeanne veut devenir institutrice. Mais la Seconde guerre mondiale chamboule sa vie et aiguise ses convictions. Elle ne peut se résoudre à abandonner la France à l’envahisseur. Avec trois de ses amies (elles étaient « les 4 de Montpellier »), elle rejoint celles et ceux qui ne peuvent se résoudre à capituler. Hélas, elle est arrêtée avec un groupe de résistants le 20 juin 1944 à Montpellier, alors que se tient une réunion clandestine. Jeanne est déportée dans les camps de Ravensbrück puis de Neubrandeburg. Elle en revient très affaiblie mais debout sur ses valeurs. Son retour est célébré à Ouveillan en 1945, la foule place Carnot et Melle Berlan l’entourant d’affection et d’admiration. L’existence reprend son cours et elle ses cours d’instit dans l’Hérault.
Comme un appel à la tolérance et à la réconciliation avec un pays dont la conscience avait été manipulée, son beau-fils est… Allemand et son premier petit-fils aura la double nationalité, franco-allemande. La Légion d’Honneur honorera en 1999 fort justement Jeanne Bleton Barraud (son nom de mariée), partie en 2016 à l’âge de 92 ans. Son souvenir demeurera à jamais à Ouveillan, son village natal, à travers le nom de l’école maternelle, berceau des savoirs.
Sa fille Mariette, qui réside en Italie, nous a écrit : « Maman parlait toujours avec beaucoup de plaisir d’Ouveillan. Elle faisait en particulier référence à une de ses institutrices, Mademoiselle Berlan, qui avait très vite décelé son potentiel, convaincant ses parents (ravis) de lui faire poursuivre ses études ». Elle conclut : « Je serai avec elle, avec vous, par la pensée ce mardi ». Joséphine, sa petite-fille, est parmi nous ce 21 juin, au solstice d’été qui offre la plus intense des lumières. Pour bien éclairer une certitude : Ouveillan n’oubliera pas. Yves Baudier publiera d’ailleurs dans quelques semaines un livre sur Jeanne.
Julien Aussenac
A sa façon, Julien Aussenac a, dès ses premières années, relié Sallèles-d’Aude, Cuxac-d’Aude et Ouveillan, précurseur d’ententes très cordiales passant notamment par le rugby ! M. Aussenac est en effet né à Sallèles-d’Aude en 1932 et a vécu à Cuxac en 1936, avant de rallier Ouveillan en 1940, le décès de la grand-mère maternelle Villeroux menant sa famille rue de la Lauze.
Attiré par l’enseignement, il suit la filière de l’Ecole normale à Carcassonne de 1949 à 1952. Son premier poste d’instituteur l’éloigne de notre territoire. Oh, pas à l’autre bout de la France, juste à l’autre bout de l’Aude, à Missègre, près de Limoux. Puis il est nommé à Ouveillan à la rentrée 1955. Il y sera instituteur puis directeur de l’école élémentaire dès 1969, enseignant jusqu’à sa retraite en 1987 avec sa voix grave et déterminée.
Parallèlement, Julien Aussenac s’investit en tant qu’élu municipal. Adjoint de 1971 à 1977, il devient maire de 1977 à 1995. Au service et à l’écoute de toutes et tous.
Toute sa vie durant, il cultive ses deux passions, l’histoire et… Ouveillan. Il les réunit dans un ouvrage, « Connais-tu Ouveillan, mon beau village » (paru en 1997) et à travers de nombreux écrits qui racontent lieux et personnages locaux, avec verve. Julien Aussenac a quitté « son » village en 2019 à l’âge de 87 ans, après une existence d’engagement, d’enseignement et de travail de mémoire. Arc bouté sur les livres autant que sur les autres, il a laissé son empreinte à Ouveillan. Baptiser l’école élémentaire de son nom est donc une reconnaissance logique et un témoignage de l’affection qu’Ouveillan lui porte désormais pour l’éternité. La présence, ici, de ses trois filles, Viviane, Dominique et Marie-Line, de la famille, nous fait chaud au cœur pour lui et pour son parcours tellement humain. Soyons certains que là-haut, près de son fils Jean-Michel, il a déjà conté l’histoire de notre commune à tout un auditoire subjugué !
Textes: Jean-Paul Chaluleau – Maire d’Ouveillan
Photos: Mairie d’ouveillan