Crise sanitaire oblige, les grands rendez-vous musicaux ont quasiment disparu du paysage. L’occasion de revenir sur l’une des plus fabuleuses aventures humaines et artistiques, les Vendanges du cœur, qui ont durant 26 ans fait le bonheur de milliers de fans des artistes français les plus en vue sous le signe de la générosité et du partage…
Le 4 août 1995, au milieu des cuves de la cave coopérative d’Ouveillan, commence une belle histoire d’amour entre une poignée de bénévoles amoureux fous de leur village et une pléiade d’artistes qui vont enchanter les 20 étés suivants. Ce soir-là, sur les coups de 21 heures, c’est un trio magique, Frédéricks-Goldman-Jones, qui régale les 4 000 spectateurs et lance cette aventure. Mais c’est en décembre 1992, au Parc des Expositions de Narbonne, qu’elle a vraiment débuté.
En septembre de cette année-là, de terribles inondations ravagent Vaison-la-Romaine, Nîmes mais également la Haute Vallée de l’Aude. La ville de Narbonne est aussi touchée par les pluies diluviennes. Les médias traitent la catastrophe mais pas de la même manière. D’ailleurs, un article dans « le Monde » titre : « les oubliés de l’Aude. » Un concert est organisé à Narbonne au profit des sinistrés. Jean-Jacques Goldman y participe. Jean-Paul Chaluleau, journaliste à l’Indépendant et résident ouveillanais, aujourd’hui maire de la commune, connaît déjà l’artiste. Il le rencontre à nouveau et le courant passe de suite.
C’est une bonne idée ! Non c’est une belle idée
En 1993, Francis Taillades et Bernard Pitié, respectivement président et directeur de la cave d’Ouveillan, touchés par ce geste de générosité, souhaitent donner une vigne au chanteur. Celui-ci, en tournée, fait un détour de Perpignan où il donne un concert et rencontre les deux hommes. Jean-Paul Chaluleau est à la manœuvre. C’est déjà un 4 août. Celui de 1994. Plus qu’un symbole. « Une vigne ? Je suis un nanti. J’ai tout ce qu’il faut. On pourrait plutôt l’offrir à une association », propose Goldman.
L’artiste est déjà engagé avec « les Restos du Cœur ». Le choix se porte évidemment sur cette association chère à son créateur Coluche. « Ok, Jean-Jacques, nous, on fait une cuvée pour les restos » s’engagent les viticulteurs. Une poignée de mains, des sourires, le contrat moral est conclu. Goldman sort ensuite de la cave, regarde les environs, les cuves, les rues avoisinantes et dit : « et moi, je vous fais un concert. C’est là qu’il faut le faire ! » Jean-Paul Chaluleau lui répond : « c’est une bonne idée ». Le chanteur le corrige : « non, c’est une belle idée ! »
En mai 1995, Goldman revient, de fait, à Ouveillan pour planter la vigne en compagnie de Véronique Colucci et des enfants de l’école du village. La belle idée est désormais enracinée. Il reste encore quelques semaines à attendre.
Une pluie diluvienne
Nous sommes donc le 4 août 1995. Il pleut sans discontinuer depuis le matin. L’orage est stationnaire au-dessus d’Ouveillan. La veille, Francis Taillades et quelques hommes forts sont partis chercher les gradins prêtés par la commune de Chalabre et transportés dans une semi-remorque louée pour la circonstance. Ceux-ci sont montés sans anicroche. Le drame de Furiani est encore dans toutes les mémoires.
Pendant ce temps, les bénévoles, 80 personnes environ, les viticulteurs d’Ouveillan et leurs épouses notamment, préparent la scène, les repas et les grillades, la vente aux enchères, l’accueil, la sécurité… Les places du concert ont toutes été vendues en quelques jours. Quelquefois pourtant, certaines personnes demandent si vraiment ce sont les vrais artistes qui viennent chanter ou des sosies.
Francis Taillades s’étonne encore aujourd’hui de l’énorme travail assuré par les bénévoles inexpérimentés et pourtant hyperpolyvalents, de l’état d’esprit qui règne ce jour-là et de la simplicité des rapports avec les artistes : « cette pluie, ce n’était vraiment pas de chance. Il nous a fallu trouver des parasols et toutes autres sortes de protection pour abriter les spectateurs. N’importe quel artiste aurait annulé le concert. Mais pas lui ! C’était inoubliable. » L’aventure prend son envol et l’année suivante, Francis Cabrel va poursuivre le voyage.
Femme de viticulteur, j’étais là pour aider, j’étais enceinte et Carole Frédericks n’arrêtait de poser sa main sur mon ventre, soirée mémorable que de souvenirs.
J’y étais. Spectatrice. Une des premières arrivée alors qu’il faisait encore nuit. Nous avons vu le soleil se lever sur les vignes. Nous avons bénéficié de l’extrême gentillesse et de l’accueil de tous à Ouveillan. Ce n’était pas une journée pluvieuse ! C’était une journée caniculaire !!! L’orage a éclaté le soir, au moment de l’ouverture des “portes” (barrières !)… On a vraiment cru que le concert serait annulé. Il a démarré avec environ 1 heure de retard, avec les parasols qui n’ont pas suffit à sauver plusieurs instruments (Philippe Grandvoinet et Jacky Mascarel s’en souviennent encore !). Le concert était juste magique et féérique ! Les palmes (sous la pluie) à “Je commence demain”, les éclaboussures lors des “tambours” sur les bidons… Les éclats de rire de Carole, Mickaël, Jean-Jacques… C’était extraordinaire. Un des plus beaux concerts qu’il m’est été donné de vivre. ^^
L’équipe d’Ouveillan est juste au TOP ! Bravo et merci à tous. ^^